USA 2020: Une illustration du Manichéisme
Analyse d’ipinion de Nadim Choueiri, Rédacteur
Janvier 26, 2021
Deux camps, deux extrêmes
Il aurait été difficile d’imaginer un jour les Etats-Unis d’Amérique se scinder en deux camps différents de nouveau, chose qui ne s’était jamais reproduite depuis la fin de la Guerre de Sécession.
Il est désormais possible de dire que l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, en 2016, a ravivé les tensions, surtout à un niveau local et national et surtout à la fin de son mandat, à savoir, l’année 2020.
Cette tension antagoniste aux Etats-Unis pourrait être simplifiée en deux forces, deux sens opposés : le camp des anti-Trump et celui des pro-Trump. L’un milite pour une Amérique plus inclusive, plus ouverte, plus acceptante de l’Autre, et l’autre milite pour une Amérique plus conservatrice, qui ne fait pas du respect et de l’inclusion de l’Autre sa priorité.
Vous l’aurez deviné, l’un est le camp anti-Trump et pro-Biden, l’autre, le camp pro-Trump et anti-Biden.
Or cette tension antagoniste est complètement normale, elle pourrait même être vue comme le signe d’une démocratie saine et bien existante. Toutefois, cela se complique quand des groupes militants d’extrême gauche et d’extrême droite se greffent à chacun des camps.
Pour le camp anti-Trump, il s’agit des manifestants violents profitant du mouvement « Black Lives Matter » - qui n’est pas violent et qui porte de bonnes intentions en lui – pour tenter de créer une sorte d’anarchie ; et face à un mouvement désireux d’anarchie, naturellement, se pose un mouvement d’extrême droite, celui des « Proud Boys », entre autres, greffé au camp des pro-Trump.
La différence serait que le mouvement lié au camp pro-Biden est à la base un mouvement qui promeut le respect des autres et des minorités, militant pour les victimes d’abus de violence des policiers. Par contre, le mouvement lié au camp pro-Trump, principalement les « Proud Boys », est à la base un mouvement d’extrême droite, qui promeut l’utilisation de la violence et des armes à feu sous prétexte de préserver l’ordre.
Nous nous retrouvons donc avec deux idéologies complètement opposées dans leur façon de voir les choses et concrètement opposées dans la rue. En termes philosophiques, nous serions en pleine illustration de ce qu’est le manichéisme, si nous considérons que l’un des camps représente le Bien et l’autre, le Mal.
Qu’est-ce que le manichéisme ?
Avant d’être une philosophie, le manichéisme est une religion, créée au IIIème siècle par un Perse du nom de Mani – d’où le préfixe mani dans le mot “manichéisme”.
Pour le manichéisme, le Monde est divisé en deux parties opposées : le royaume de la Lumière et le royaume des Ténèbres.
L’homme, quant à lui, naquit de l’union entre les ténèbres et la lumière, ce qui fait que l’Homme est un être double : son esprit, immortel, appartient au royaume de la Lumière, tandis que son corps, mortel, appartient au royaume des Ténèbres.
Le manichéisme se base donc sur un combat entre le Bien (royaume de la Lumière), et le Mal (royaume des Ténèbres), ainsi que sur le fait que ces deux entités sont clairement divisées, séparées. Sous l’égide du royaume des Ténèbres se place tout ce qui est périssable et sous l’égide du royaume de la Lumière tout ce qui est éternel.
Ainsi, pourrions-nous aboutir à un résultat assez intéressant si nous voulions analyser les faits évoqués précédemment d’un point de vue dit “manichéen”.
Le manichéisme, made in the U.S.A.
Comme nous l’avons écrit, nous sommes face à deux idéologies américaines qui s’opposent entre elles. L’une – celle de Biden - se concentre sur l’inclusion, la lutte contre les discriminations de tous genres, mais aussi sur le développement économique du pays. L’autre – celle de Trump – privilégie (en théorie) un développement économique, sans forcément prioriser la lutte contre les discriminations raciales ou sociales.
Toutefois, le laxisme de Trump face à certains problèmes sociaux - auxquels, comme nous l’avons dit, il n’accorde pas beaucoup d’importance - ont favorisé la remontée de certaines façons de voir les choses anciennes, au caractère dangereux.
En ce sens-là, nous pouvons évoquer ses réactions face aux violences policières qui ont coûté la vie à plusieurs individus afro-américains : des réactions comme « de passage », vite faites, alors qu’il s’agit d’un problème récurrent, grave. En plus de cela, son support ambigu au groupe d’extrême droite les « Proud Boys », avec son fameux « Stand back, standby » a fait que dans notre équation manichéenne, Trump représente le côté du Mal.
Il aurait - volontairement ou par pure maladresse – préparé le terrain à la résurgence d’une idéologie que les Américains et le monde entier, avaient pensée disparue aux États-Unis : celle de la ségrégation et du racisme, de l’extrême droite, une idéologie qui se faisait répandre en 2020 au nom des Etats-Unis.
Pour en revenir au manichéisme, cela représenterait le côté des Ténèbres : Trump a ressorti, ou du moins favorisé le retour de ce qu’il y a de plus ténébreux, de plus noir dans l’Histoire des Etats-Unis. En déchaînant les passions des plus extrémistes, il leur a donné comme une licence pour manifester avec des banderoles aux slogans racistes et parés d’armes de combat - chose pour laquelle ils militent, bien évidemment.
Cet aspect ténébreux a sans doute été réintroduit et rallumé dans la société américaine sans doute à cause du laxisme de l’ex-président face aux problèmes sociaux qui ne sont pas sa priorité, comme nous l’avons dit.
Trump est donc, à cause de ce qui a découlé de ses dires en public, le représentant du côté du Mal, d’un point de vue manichéen. Biden quant à lui, vient clairement en opposition à cette figure du Mal, dénonçant précisément les conséquences de la politique de Trump ainsi que le large fossé qui s’est creusé au sein du peuple
américain. Il se fixe pour objectif de reconstruire le pays et d’unir son peuple à nouveau. Parviendra-t-il à mener à bien sa mission, sans oublier qu’il y a toujours 74,222,958 Américains convaincus des idéaux Trumpistes ?