Les champignons, un monde mystérieux au Liban !

Edward Sfeir, auteur

Novembre 3, 2020

Contrairement à de nombreuses idées reçues, les champignons ne sont pas des éléments temporaires de passage enautomne ou au printemps dans les milieux naturels. 

En fait, les champignons sont des éléments principaux des écosystèmes naturels où ils sont présents toute l’année à travers de réseaux souterrains ou à travers des mycéliums formés de filaments appelé hyphes, sorte de cellule du champignon. 

Les champignons se montrent pour se reproduire grâce à des spores -sorte de poussière très fine et parfois odoranteproduites par des structures aériennes, telle la partie visible du champignon. 

Ces spores seront dispersées par le vent, la pluie et certains animaux comme les mouches. Ainsi, en dehors de leur période de reproduction, les champignons sont là mais cachés dans le sol. 

Quand ils se montrent, les champignons déploient une diversité de formes : « Ils peuvent avoir plusieurs formes selon l’espèce. La forme la plus commune est celle en parapluie, c’est-à-dire un pied surmonté par un chapeau. D’autres formes se présentent telles que les coupes creuses, globuleuses ou aplaties, un aspect de corail ou en trompette, des champignons qui ressemblent à des sabots de cheval (sur les troncs des arbres) voire des champignons tout ronds et sphériques croissant à la surface ou dans le sol. 

 

Hétérotrophes donc incapables de fabriquer leur propre nourriture comme les plantes ; les champignons sont des décomposeurs qui jouent un rôle crucial dans le cycle de recyclage de la matière organique dans les écosystèmes et par la suite la durabilité de la vie dans ces écosystèmes. 

« Leur rôle de décomposeur est un maillon principal de la chaîne trophique ou alimentaire dans laquelle les producteurs primaires (les végétaux entre autres) produisent la biomasse ou la nourriture, qui sera ensuite consommée par les herbivores, qui à leur tour serviront de nourriture pour les carnivores, pour être tous décomposés après leur mort par les champignons (et autres décomposeurs), recyclant ainsi la matière organique en éléments simples qui seront de nouveaux utilisés par les organismes producteurs de l’écosystème» explique Dr. Rana El Zein spécialiste en écophysiologie forestière et enseignante à la faculté des sciences de l’Université Saint Joseph de Beyrouth - USJ. 

Pour avoir accès à la matière organique, les champignons décomposeurs ont recours à 3 modes de vie :

-       Saprophyte : ils décomposent la matière organique morte (arbre mort, animaux morts…)

-       Mutualiste : ils s’associent avec d’autres organismes pour un échange de bénéfice mutuel, assurant ainsi de la matière organique en provenance du partenaire (souvent une plante)

-       Parasite : dans ce cas, les champignons vivent au détriment d’une plante ou d’un animal auxquels ils volent de la matière organique.

 

« Les champignons prospèrent dans une diversité de milieux naturels (comme la forêt, les prairies) et anthropisés (les habitations humides et mal aérées). Il leur faut de la matière organique à décomposer et de l’humidité et ils sont là ! » affirme l’experte. 

En milieu forestier, les champignons ont une importance primaire pour le développement des essences forestières. En fait, ils établissent un partenariat à bénéfice mutuel avec les racines des arbres qu’ils protègent contre les pathogènes en leur fournissant des nutriments clés en retour de matière organique fabriquée par l’arbre. Ce partenariat, appelé symbiose mutualiste, est vital pour les arbres forestiers : sans lui, leur croissance est compromise. De même, ceci explique pourquoi la forêt est le milieu idéal pour la cueillette saisonnière des champignons qui émergent sous les troncs des arbres. De même, des études récentes soulignent le rôle crucial de ces symbioses dans la résistance des arbres forestiers face à de nombreux stress telle que la sécheresse, ajoute Dr. El Zein. 

Cependant, les champignons peuvent être nuisibles pour les arbres et d’autres espèces. C’est le cas des champignons parasites par exemple, qui profitent d’une plaie pour envahir un arbre vivant et vivre à ses détriments c’est-à-dire en décomposant sa matière organique vivante, causant maladies, retard de croissance voire mort de l’arbre. Les champignons parasites s’attaquent également aux animaux, causant de nombreuses maladies, comme les mycoses. 

 

L’importance des champignons dépasse les milieux naturels… et s’étend à la cuisine, l’industrie agro-alimentaire et pharmaceutique !

Giroles, bolets, morilles, truffes… Ces champignons font partie des espèces les plus appréciées en cuisine. 

Vous en avez probablement entendu parler.  

Néanmoins, ils ne sont pas tous aussi délicieux et peuvent parfois être mortels.  

Il est à noter que l’intérêt économique des champignons est grand. «Un grand nombre d’espèces sont comestibles comme le champignon de Paris, les giroles, les truffes… 

Une variété de champignons est utilisée dans l’industrie fromagère pour fabriquer des fromages tels que le roquefort et le camembert qui doivent leur goût et leur texture à une injection de spores de champignons. En effet à chaque fois que l’on déguste un « fromage bleu », sont consommées plein de spores. 

 

La levure, champignon unicellulaire (microscopique) est utilisée en boulangerie pour lever le pain et pour la fabrication de boissons alcooliques telle que la bière.

 

La spécialiste enchaîne ensuite les progrès médicaux dans la lutte contre les maladies infectieuses qui ont révolutionné la médecine suite à la découverte de la pénicilline, un antibiotique, par le microbiologiste Alexandre Flemming en 1928. 

Il y a également de nombreux médicaments issus des champignons, tel que la cyclosporine, immunosuppresseur utilisé pour prévenir le rejet des organes greffés.

 

Cependant, au-delà de leur utilité, les champignons peuvent être très compromettants : c’est le cas des champignons toxiques, hallucinogènes, cancérigènes ou encore mortels. 

 

« Avec les champignons, on ne s’aventure pas ! » s’exclame la botaniste. 

Des espèces comestibles et d’autres toxiques peuvent se ressembler à quelques détails près, faisant de la différenciation morphologique un défi, surtout quand on n’est pas expert (mycologue) ou connaisseur. 

Il est impératif de ne pas consommer une espèce de champignon cuite ou crue si on ne la connaît pas. 

Il serait incontestablement plus « vital » d’observer ce monde discret et merveilleux dans des photos en évitant de toucher aux spores (la poussière dégagée par les champignons) afin que votre balade en nature ne tourne pas au drame. 

 

Si vous êtes des amateurs de champignons, on vous conseille vivement de prévoir des balades et randonnées automnales après quelques épisodes de pluies généreuses, ou en début de printemps quand le sol est encore bien humide, surtout dans les forêts. 

Il faut noter que chaque forêt a son cortège fongique, ce qui vous permettra une expérience nouvelle à chaque fois que vous changerez de forêt (pinède, chênaie, cédraie, sapinière) et d’altitude.

 

Afin d’identifier les espèces de champignons -vu que ce règne est toujours peu exploré et inventorié au Liban- on vous conseille de joindre l’utile à l’agréable en partageant vos photos de champignons sur les plateformes de réseaux sociaux y consacrées.

 

Mushrooms of Lebanon and Levant :

 https://www.facebook.com/groups/267919310527390

Fungi in Lebanon: https://www.instagram.com/fungiinlebanon/?igshid=rmoggs3461nz&fbclid=IwAR0_vr0ibJXzDNDRd9jH7cmDcN3cW782Yni9ZYd6Rg4G9CutYYSGvDl2keo

 

Ainsi, vous aiderez à faire avancer les connaissances sur les champignons du Liban !

« Pour que les photos soient exploitables, il faudra suivre les consignes suivantes : prendre une photo d’ensemble montrant les individus dans le milieu où ils sont présents, suivie de photos de près montrant la morphologie et les détails structuraux de l’espèce (chapeau, couleurs, lames)… » conseille Dr. El Zein. 

Vous allez souvent en randonnées et avez des photos de champignons ? Partagez vos clichés avec des experts sur les pages Facebook et Instagram suivantes :

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